Publié le 4 juin 2025 dans Articles
Le secteur du CHR (Cafés-Hôtels-Restaurants) évolue vers une gestion plus responsable de ses emballages. Cette progression répond à la fois aux impératifs écologiques et au besoin d’optimiser les coûts à long terme. En 2024, l’entrée en vigueur de la Responsabilité Élargie du Producteur des Emballages de la restauration (REP ER) est venue soutenir le développement de solutions efficaces. Parmi elles : le réemploi. Déjà bien implanté pour les bouteilles en verre et les fûts, ce modèle offre des avantages tangibles pour les acteurs de la filière et leur clientèle. Qu’en est-il en 2025 ? Faisons le point.
Le réemploi consiste à utiliser plusieurs fois un emballage pour le même usage que celui pour lequel il a été conçu, après entretien et nettoyage. Dans ce cas, l’emballage ne devient pas déchet puisqu’il est réintroduit dans une nouvelle boucle d’utilisation.
Le réemploi s’inscrit ainsi directement dans la logique de réduction des déchets. On distingue le réemploi de la réutilisation où l’emballage a une fonction différente dans son second cycle.
Lorsqu’on parle des emballages du secteur CHR, on vise les emballages primaires détenus par les restaurations commerciales et collectives, les hôtels et les débits de boissons. Autrement dit, il s’agit des emballages de produits alimentaires que les professionnels du CHR vont avoir entre les mains : bouteille petit ou grand format, pot de crème, fûts de boissons, sac de farine, etc.
Pour l’heure, l’analyse du marché révèle trois catégories principales d’emballages réemployables dans le secteur CHR :
Les bouteilles en verre : La Fédération Nationale des Boissons (FNB) indique que 550 millions de bouteilles consignées circulent chaque année en France1. Les distributeurs livrent des caisses aux établissements et les récupèrent vides lors des livraison suivantes, perpétuant une boucle bien rodée. Il s’agit ici par exemple des bouteilles en verre de soda, d’eau plate ou gazeuse, etc.
Les fûts de boissons : Principalement utilisés pour la bière ou le cidre, la FNB dénombre 17 millions de fûts en inox réemployés. Avec une durée de vie estimée à 30 ans, ils représentent un exemple abouti de réemploi dans le secteur CHR.
Les bacs gastronormes : Beaucoup de ces contenants utilisés dans la restauration collective pour transporter les repas sont en plastique à usage unique. La restauration collective fonctionne avec une cuisine centrale qui prépare les repas, puis les distribue à des cuisines satellites (écoles, hôpitaux, etc.) qui réalisent le service. Ces cuisines satellites doivent utiliser des contenants en acier ou en inox pour réchauffer les plats. Cependant, le transport des repas s’effectue via des bacs en plastique jetables, souvent pour des raisons de coût et de logistique simplifiée pour les cuisines centrales.
Le passage au réemploi des emballages du secteur CHR présente plusieurs avantages :
● Réduction directe des déchets : un emballage réemployable évite la production de déchets à chaque utilisation. Un produit en verre utilisé au moins deux à quatre fois génère un avantage environnemental, bien qu’en deçà du seuil de rentabilité économique du réemploi2.
● Bénéfices pour la santé : l’exposition aux microparticules de plastiques et le risque de migrations de substances néfastes pour la santé sont réduits. À ce titre, la loi EGAlim interdit l’usage de contenants alimentaires en plastique à usage unique pour la cuisson, le réchauffage et le service en restauration scolaire, universitaire et accueillant des enfants de moins de six ans depuis le 1er janvier 20253.
● Impact économique local : le réemploi représente un potentiel de 800 000 emplois 4non délocalisables dans les filières de collecte, lavage et logistique.
● Investissements durables : même si le plastique est moins cher à l’achat, le réemploi peut présenter un avantage économique notable sur le long terme du fait de l’allongement de vie de l’emballage et de la logique de financement tournée vers le service plutôt que la vente.
Cette année, Citeo Pro renouvelle son appel à projets EncoRE plus de réemploi ouverts à ses clients et aux apporteurs de solutions. 246 000€ de financement sont disponibles jusqu’au 31 décembre 2025.
Citeo Pro finance 50% des projets de réemploi d’emballages sélectionnés, jusqu’à 50 000€ HT. Les projets intégrant la traçabilité bénéficient d’un financement majoré à 70% (plafond de 62 500€ HT).
La réglementation européenne transposée en France par la loi AGEC 5fixe un objectif de 10% de réemploi en 2027. À 2 ans de l’échéance, les contraintes logistiques, économiques et sanitaires persistent néanmoins.
Il est difficile d’estimer les pourcentages de réemploi sans connaître précisément le volume total d’emballages en circulation. Les différentes études, réalisées par le passé, ne mesurent pas toujours les mêmes paramètres, et conduisent à des informations peu fiables.
Le système de REP contribue à résoudre cette problématique grâce à l’obligation de déclaration et à la mission confiée aux éco-organismes d’améliorer la traçabilité des emballages. Depuis le 1er janvier 2024, toute entreprise qui met en marché plus de 10 000 unités de vente d’emballage de la restauration a l’obligation de déclarer à son éco-organisme, ou à défaut à l’ADEME, les emballages à usage unique, les emballages réemployés (dès leur deuxième utilisation) et l’ensemble des emballages réemployables neufs.
L’investissement initial pour passer au réemploi peut décourager de nombreux établissements, particulièrement les plus petits, qui font peser les frais sur le consommateur final.
Aussi, le manque de standardisation des contenants complique la gestion des emballages réemployables et augmente les coûts logistiques pour les opérateurs de collecte et de réemploi. L’attractivité du modèle économique du réemploi en est réduite.
La logistique inverse nécessite des équipements spécifiques pour la collecte, la gestion des volumes et des formats ainsi que pour le contrôle de la qualité des emballages, avant réintégration dans le cycle de circularité. Or, ces réseaux demeurent insuffisamment développés sur le territoire.
Des initiatives s’installent ! Par exemple, le Syrec et Siresco ont créé la laverie mutualisée SEMELOG.
● Leur mission : opérer la collecte, le nettoyage et le réemploi des contenants pour la restauration collective.
● Leur objectif de performance : traiter plus de 100 000 pièces dont 40 000 bacs gastronormes par jour6.
Les professionnels de la restauration travaillent à rythme soutenu avec des marges réduites. Modifier leurs opérations quotidiennes représente donc un enjeu majeur.
L’obligation de déclaration des emballages incombe aux metteurs en marché, mais les professionnels du CHR contribuent à améliorer le suivi des emballages et donc du réemploi : scan de codes, maîtrise des bons gestes de tri, participation aux circuits de collecte et de consigne, etc.
Un emballage dans le secteur du CHR doit répondre à des exigences d’hygiène et de solidité. Toute anomalie (corps étrangers, déformations, bactéries, marques d’usure) peut entraîner l’élimination de l’emballage du circuit de réemploi, voire gaspillage alimentaire.
Comment ? Par un dispositif de financement pour encourager grossistes et cuisines centrales à accélérer le réemploi des fûts, bouteilles en verre consignées et bacs gastronormes (GN).
Chaque emballage réemployable collecté et tracé donne droit à une aide financière.
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1 – Standardiser les formats d’emballages
Une standardisation des emballages pourrait simplifier la logistique et optimiser les coûts d’exploitation au niveau de la collecte, du nettoyage et de la redistribution, notamment les taux de chargement des camions en plus de mutualiser les emballages entre les différents acteurs.
2 – Développer des infrastructures de proximité
Pour être efficace, le réemploi doit se penser local. Un réseau d’opérateurs de proximité réduit les distances de transport et permet des économies d’échelle grâce à des installations mutualisées.
3 – Encourager l’innovation et l’écoconception
Certaines entreprises développent des emballages réemployables optimisés : matériaux allégés, QR codes pour la traçabilité et designs adaptés aux cycles de lavage industriel tout en tenant compte de l’allongement de la durée de vie de l’emballage et de son poids. Un enjeu fort pour les bacs gastronormes en inox dont le poids est élevé.
4 – Sensibiliser et simplifier l’intégration
Le réemploi ne s’imposera que s’il s’intègre facilement dans les processus quotidiens des établissements. Des opérations de sensibilisation pour les professionnels et une communication claire auprès des consommateurs encouragent l’adoption des bons gestes. La simplicité d’usage pour les détenteurs et les consommateurs finaux reste un critère déterminant pour une adoption massive.
À l’approche de l’échéance de 2027 fixée par la loi AGEC, le secteur CHR doit accélérer sa transformation. Si les bouteilles en verre et fûts en inox démontrent la viabilité de ce modèle, d’autres contenants comme les bacs gastronormes représentent un potentiel encore sous exploité. Pilier de l’économie circulaire, le réemploi constitue à terme un levier de performance économique et d’impact environnemental maîtrisé.