Les entreprises qui fabriquent ou commercialisent des produits et emballages doivent assumer la responsabilité de la gestion des déchets générés par les produits qu’elles mettent en marché. Issue du principe de la Responsabilité Élargie du Producteur (REP), ce dispositif a pour objectif d’agir sur l’ensemble du cycle de vie des produits et emballages dans une démarche d’économie circulaire : l’écoconception des produits, la prévention des déchets, l’allongement de la durée d’usage, le développement du réemploi et la gestion de la fin de vie. Pour s’organiser au mieux, ces entreprises disposent de deux possibilités :
soit elles créent leur propre système individuel de gestion des déchets ;
soit elles mettent en place une structure collective, l’éco-organisme.
Un éco-organisme est donc une société de droit privé à but non lucratif financée par ces entreprises adhérentes, c’est-à-dire le premier metteur sur le marché en France d’un produit ou d’un emballage. Il joue un rôle clé dans la filière REP en assurant la responsabilité de ses adhérents. Pour exercer ses missions, l’éco-organisme doit obtenir un agrément des pouvoirs publics valable pour une durée maximum de 6 ans, renouvelable.
Si vous êtes fabricant, distributeur ou importateur de produits et emballages visés par une filière REP, l’adhésion à un éco-organisme agréé est en principe obligatoire.
C’est notamment le cas pour les metteurs en marché d’emballages de la restauration dont les obligations ont évolué en mars 2024 avec l’adoption de la REP des Emballages de la restauration.
L’origine de l’éco-organisme, la production croissante des déchets
La prise de conscience des industriels
Face à l’augmentation continue des volumes de déchets, la mise en place d’un concept structuré de Responsabilité Élargie du Producteur – dérivée du principe de « pollueur-payeur » – s’imposait. En France, le tournant survient avec l’adoption du décret du 1er avril 1992 qui établit la première filière REP consacrée aux emballages ménagers1, inspiré des travaux menés par Antoine Riboud (Fondateur et Président de Danone) et Jean-Louis Beffa (PDG chez Saint-Gobain). La naissance du premier éco-organisme, Eco-emballages (aujourd’hui Citeo), créé à l’initiative de Monsieur Riboud a accompagné cette réforme.
Cette évolution s’inscrit dans une réflexion amorcée dans les années 1970, lorsque Monsieur Riboud soulevait déjà la double responsabilité de l’entreprise2 : poursuivre la performance économique tout en veillant au bien-être des salariés et à l’impact de ses activités sur l’environnement. En 1975, la loi relative à l’élimination des déchets et à la récupération des matériaux consacre cette idée en posant le principe des filières REP3: “Il peut être fait obligation aux producteurs, importateurs et distributeurs de ces produits ou des éléments et matériaux entrant dans leur fabrication de pourvoir ou de contribuer à l’élimination des déchets qui en proviennent.”
Le besoin de mutualiser l’opérationnel
Chemin faisant, depuis 1992 le principe est donc celui-ci : fabricants, distributeurs et importateurs deviennent directement responsables des déchets issus de leurs produits et emballages. Face aux coûts opérationnels engendrés par ces obligations (gestion et traçabilité des déchets, financement de la collecte et du traitement), les entreprises peuvent privilégier une organisation collective:les éco-organismes.
Cette “innovation organisationnelle”4, pilotée par les entreprises et encadrée par l’Etat, a transformé la gestion des déchets selon trois axes majeurs :
Evolution d’un financement public à un financement privé ;
Transfert de responsabilité des collectivités locales vers les producteurs et les éco-organismes ;
Prise en considération d’une approche globale du cycle de vie de l’emballage : anticiper plutôt que subir les déchets, via l’éco-conception, la réduction des emballages, la réparation et le réemploi.
Vous l’aurez compris, ces structures collectives permettent de mutualiser ressources et expertises pour répondre efficacement aux exigences légales en faveur de la réduction des déchets et l’allongement du cycle de vie d’un produit et d’un emballage.
Le cadre de l’éco-organisme, son cahier des charges
Les éco-organismes jouent un rôle d’intermédiaire entre plusieurs acteurs. Ils assurent l’interface entre les pouvoirs publics, les opérateurs de collecte et de réemploi, les producteurs responsables de la mise sur le marché (fabricants, distributeurs, importateurs), et les utilisateurs finaux des produits et emballages. Il existe deux types d’éco-organismes :
Les éco-organismes financiers qui reversent une partie des contributions aux collectivités territoriales, opérateurs, acteurs du réemploi et autres structures afin de les aider dans leur mission de gestion des déchets ;
Les éco-organismes opérationnels qui prennent directement en charge la collecte et le traitement des déchets.
Leurs missions sont encadrées par un cahier des charges précis. La procédure d’agrément se déroule comme suit :
Définition du cahier des charges par arrêté interministériel ;
Examen du dossier de candidature par une commission consultative représentative de la filière ;
Supervision assurée par un censeur d’Etat et le ministère de l’Ecologie.
En sollicitant cet agrément, l’éco-organisme s’engage formellement sur des objectifs concrets, tant en termes de moyens déployés que de résultats à atteindre.
Les éco-organismes tirent leurs ressources financières de l’éco-contribution. Il s’agit d’un mécanisme financier structuré qui correspond au versement, par les entreprises, d’une contribution calculée selon 2 éléments principaux :
la quantité et la typologie des produits et emballages fabriqués et distribués ;
le coût de la gestion du déchet en fin de vie.
Afin d’inciter la prise en compte de l’empreinte environnementale d’un produit dès sa conception, ces contributions peuvent faire l’objet d’une éco-modulation. Ce système de bonus-malus s’appuie sur le respect de certains critères environnementaux incitatifs comme la recyclabilité du produit, le réemploi de l’emballage, l’intégration de matières recyclées à la fabrication, etc.
Ce dispositif est rigoureusement encadré par les pouvoirs publics avec le soutien de l’ADEME qui collecte les données et garantit le suivi des actions menées en faveur de la réduction des déchets, du recyclage et du réemploi. Les éco-organismes transmettent à l’agence de l’environnement les données de contributions perçues, les quantités mises sur le marché et les tonnages de déchets collectés et traités.
L’éco-contribution perçue par les éco-organismes leur permet de conduire 4 grands types d’actions :
1. Organisation opérationnelle de la fin de vie des produits et emballages
L’intervention des éco-organismes s’articule tout au long de la chaîne de gestion des produits en fin de vie :
Accompagnement et soutien des opérations de collecte, recyclage et réemploi (auprès d’opérateurs privés, d’acteurs du réemploi ou des collectivités territoriales en soutien aux dépenses publiques relatives à la gestion des déchets);
Mise en place de systèmes de traçabilité pour garantir la conformité des opérations de collecte, de traitement et de réemploi.
2. Promotion de l’éco-conception
Le mécanisme d’éco-modulation et le soutien des éco-organismes à l’innovation et la R&D encouragent les fabricants : à concevoir des produits plus facilement réparables et démontables ; à réduire la présence de plastiques dès la conception ; à intégrer davantage de matériaux recyclés et recyclables dans les nouveaux produits et emballages.
3. Développement du réemploi
Le réemploi est un enjeu prioritaire de la réduction des déchets. Conformément à leur cahier des charges, les éco-organismes consacrent 5% de leur budget au développement du réemploi. Cet engagement est particulièrement significatif dans la perspective d’atteindre l’objectif ambitieux de 10% d’emballages réemployés en 2027. Ce dernier a été fixé par la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, dite loi AGEC6.
4. Information et sensibilisation
Les éco-organismes doivent déployer des programmes de communication et de sensibilisation de toutes les parties prenantes : compréhension des enjeux de la REP, accompagnement pour la mise en conformité, adoption des bons gestes de réemploi et de tri, fluidité des opérations de collecte, etc.
Illustration du rôle de l’éco-organisme : Citeo Pro et les emballages de la restauration
Citeo Pro est le seul éco-organisme agréé pour les emballages de la restauration depuis mars 2024. Voici comment s’organise son rôle.
L’essentiel : Qu’est-ce qu’un éco-organisme ?
Structure
Société de droit privé à but non lucratif agréée par l’État pour une durée maximum de 6 ans, renouvelable.
Mission
Prendre en charge la gestion de la fin de vie des produits et emballages pour le compte des entreprises qui les fabriquent, les distribuent ou les importent en échange d’une éco-contribution.
Financement
Éco-contributions versées par les producteurs selon les quantités et typologies de produits et d’emballages mises sur le marché.
Fondement
Application du principe pollueur-payeur et participation à l’efficacité de la REP.
Résultats attendus
Amélioration des performances des filières REP en matière de recyclage et de réemploi, incitation à l’éco-conception, simplification des processus, et traçabilité efficace des produits et emballages.