Emballages pro

Matinée emballages pro :  passer à l’échelle le réemploi 

Comment généraliser le réemploi des emballages professionnels ? Est-ce possible ? Le 15 octobre 2025, Citeo Pro réunissait une centaine d’entreprises pour échanger sur l’arrivée de la future REP Emballages professionnels. Au cours de la matinée, une table ronde dédiée au réemploi a permis de dessiner les contours d’une transition réussie. Au programme : traçabilité, standardisation et mutualisation.

@Anna Ellouk Photographe

Pour aller plus loin

Retours sur une discussion riche de retours en expériences et d’analyses avec la participation d’experts de terrain :  
Gilbert Branchet, Directeur général de la Semelog ;  
Stéphane Cren, Responsable Impack’t chez GS1 France ;  
Frédéric Torrente, Directeur général chez Cogit L.G.C. ; 
Foucauld Baschet ; Chef de projet réemploi chez Citeo Pro ;
Eric Ballot, Professeur à l’Ecole des Mines de Paris, Université PSL. 

Tracer les emballages professionnels, pré-requis au passage à l’échelle du réemploi  

Pour un réemploi à l’échelle, la traçabilité des emballages professionnels doit reposer sur trois piliers : des systèmes capables de communiquer entre eux, des données fiables pour mesurer la performance, et des technologies adaptées. 

Développer l’interopérabilité numérique des systèmes 

La question de l’interopérabilité s’impose comme le préalable au déploiement du réemploi à grande échelle. Il s’agit de la capacité des différents systèmes à communiquer entre eux et à échanger des données de manière fluide. À la source de ce concept se trouve la traçabilité.   

Stéphane Cren

Responsable Impack’t chez GS1 France

La traçabilité, c’est la capacité à suivre les flux, à suivre les stocks, à suivre les états des emballages professionnels

Elle couvre des enjeux de reporting en permettant un suivi efficace des performances opérationnelles et permet d’assurer l’équilibre financier du réemploi : un taux de réemploi trop faible rend le réemploi trop coûteux puisqu’il faudra régulièrement renouveler le parc d’emballages réemployables. Elle est aussi un outil de sécurité et de sûreté des produits emballés.  

Avec l’entrée en vigueur de la nouvelle filière en janvier 2026, la traçabilité des emballages professionnels devient un enjeu clé. Elle doit être généralisée afin de mieux connaître la performance réelle du réemploi. 

L’interopérabilité des systèmes de traçabilité est d’autant plus importante que les entreprises ont des priorités différentes : 
– Certaines veulent tracer chaque emballage individuellement pour savoir où ils sont, combien de fois ils circulent, et éviter d’avoir des stocks inutiles ; 
– D’autres veulent relier l’emballage à ce qu’il contient pour des raisons de logistiques ou de gestion. 

La solution : construire un socle commun avec les fournisseurs de solutions de traçabilité, tout en permettant à chaque secteur d’adapter le dispositif. Ce socle doit garantir l’émission de données intelligibles, l’interconnexion des systèmes et l’adoption d’identités universelles pour les emballages. 

Foucauld Baschet

Chef de projet réemploi chez Citeo Pro

L’enjeu de la REP des emballages professionnels est de collecter et de consolider la donnée pour mesurer l’atteinte des objectifs réglementaires de 10% de réemploi

Identifier le coût carbone et économique d’un emballage 

Sans traçabilité, pas de données. Sans données, pas de mesure de performance. En effet, le suivi d’indicateurs clés pourra convaincre les industriels de basculer vers le réemploi : temps de rotation, retour sur investissement, coût carbone par usage. 

Frédéric Torrente témoigne. 13 à 15 millions d’emballages sont en circulation chez Cogit L.G.C. L’entreprise réussit à calculer précisément le nombre de rotations de chaque contenant. Les emballages peuvent avoir une durée de vie de 5, 7, voire 10 ans, ce qui permet d’amortir l’empreinte d’un emballage sur des temps longs et un grand nombre de boucles  « C’est ça le vrai enjeu : la traçabilité va permettre d’avoir des données très factuelles sur le coût carbone et le coût économique d’un emballage ». 

Face à des industriels qui optimisent déjà leurs emballages, le défi consiste à rendre le réemploi économiquement compétitifLa vitesse de rotation devient alors l’indicateur décisif : accélérer les mouvements, éviter l’immobilisation, limiter les pertes, récupérer les emballages.  

Choisir les technologies de traçabilité 

On recense aujourd’hui 4 solutions pour suivre les flux d’emballage : le QR Code, la technologie RFID (Radio Frequency Identification), le Bluetooth et le GPS. 

Chez Cogit L.G.C., s’il n’y a pas de parti pris, la technologie RFID reste la plus utilisée. En effet, le choix des technologies dépend des volumes et des contraintes opérationnelles. 

Frédéric Torrente

Directeur général chez Cogit L.G.C.

On ne peut pas avoir un opérateur qui va passer ses journées à lire l’entièreté des codes-barres des caisses dans les camions qui rentrent à l’entrepôt

90 % du parc d’emballages traités par Cogit L.G.C. est tracé grâce à cette technologie. Par exemple, dans le secteur automobile, l’entreprise arrive à scanner 80 unités en 4 secondes. 

La Semelog a fait le choix du QR Code pour ses bacs gastronormes standardisés destinés à la restauration collective. La puce RFID supporte mal la cuisson et ne permet pas une bonne lecture dès que les bacs gastronormes sont empilés. 

Demain, le Tag 5G ?

Une innovation qui pourrait lever certains freins au réemploi. Technologie non intrusive le Tag 5G ne nécessite aucune infrastructure spécifique puisqu’il dépend du réseau mobile, pour un coût comparable à la technologie RFID.  

Standardiser les emballages professionnels, un game changer 

Après la standardisation numérique, place à la standardisation des emballages, second pilier du réemploi à grande échelle.  

L’exemple réussi des conteneurs maritimes 

Le conteneur maritime aujourd’hui c’est : « deux tailles, tout rentre dedans, même le vrac », résume Eric Ballot. Cette standardisation a multiplié par 13 la productivité du transport maritime. 

​​​D​​eux options s’offraient aux industriels, soit chacun restait sur son mode de fonctionnement individuel, pas toujours rentable, soit tous collaboraient pour développer un marché bien plus vaste. ​​Pour mettre en place ce système, les industriels se sont réunis pour s’accorder sur une norme commune, notamment pour le twistlock (mécanisme d’arrimage qui permet d’empiler les conteneurs les uns sur les autres en toute sécurité). 

Aujourd’hui, l’organisme GS1 France ​​porte un standard digital avec une donnée homogène et travaille sur une caisse réemployable standardisée,​​ la Smartbox. Ces solutions pourraient jouer ce rôle fédérateur pour les emballages professionnels européens.  

Les avantages économiques de la standardisation 

​​​Cette standardisation présente un double avantage. D’une part, elle facilite la mutualisation des parcs d’emballages : si tous utilisent les mêmes formats, les flux logistiques deviennent plus fluides. Déplacement et stockage des produits sont simplifiés pour tous. ​​D’autre part, elle permet de repenser l’emballage au profit d’une empreinte carbone réduite. Des études montrent qu’une meilleure standardisation des emballages avec une résistance maîtrisée pourrait réduire de 30 % la matière nécessaire à l’emballage. 

Gilbert Branchet témoigne de la transformation engagée par la Semelog pour accompagner les cuisines centrales au passage au réemploi. La bascule vers le réemploi nécessite des investissements conséquents : adaptation des lignes de conditionnement alimentaire, équipement en traçabilité, mise en place de bacs standardisés et d’une solution de lavage. Tout l’enjeu est de tendre vers la simplicité et de surmonter le mur des investissements. Pour cela, la Semelog a créé un business model sur 15 ans, lissant emprunts et contrats avec ses clients principaux, les cuisines centrales publiques.

Gilbert Branchet

Directeur général de la Semelog

On est tout de suite en coût global avec le réemploi alors qu’on a des coûts cachés lorsqu’on a des déchets

La standardisation a permis la robotisation, réduisant les contraintes ergonomiques et le port de charges liées au poids de l’inox. 

Le modèle semble prometteur. Avec une usine de lavage permettant de laver les contenants de plus de 160 000 repas par jour, la Semelog couvrira un cinquième des besoins de l’Île-de-France. D’autres Semelog pourraient voir le jour pour répondre aux besoins des hôpitaux et à la restauration collective privée, à condition de garantir visibilité et volumes suffisants. 

Citeo Pro : Mutualiser pour accélérer le passage à l’échelle 

S’il fallait retenir une chose de cette table ronde c’est que «Tout l’enjeu du réemploi repose sur la traçabilité et la mutualisation», répète Foucauld Baschet. Si chaque acteur conserve son propre emballage et gère seul les retours, le modèle reste inefficace et coûteux.  

Pour favoriser le passage à l’échelle, Citeo Pro lancera deux dispositifs financiers à compter de 2026 (sous condition de l’obtention de l’agrément emballages professionnels) :  
– L’enveloppe 5% pour le financement des investissements (changement de ligne logistique, achat d’un parc d’emballages, acquisition de solutions de traçabilité) prévu dans le projet de cahier des charges.  
– Un soutien aux opérations, déjà testé pour le réemploi des emballages de la restauration

L’ambition portée vise à rendre le réemploi concurrentiel face à l’usage unique en accélérant les investissements et en finançant une partie des opérations.  

Matinée emballages pro

Replay

Retrouvez le récap’ de la matinée dédiée à la future REP Emballages professionnels